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Des questions pour ouvrir les possibles

Le groupe de prospective numérique de Franche Comté n'est pas constitué d'experts du numérique mais de chefs d'entreprises, de chercheurs, d'artistes et de bloggeurs représentant une diversité de points de vue permettant d'enrichir la thématique. Le groupe est donc à même de poser de bonnes questions aux experts et d'identifier des possibilités d'actions pertinentes pour le territoire. Changer la façon de formuler la question est probablement la meilleure façon d'arriver à une solution innovante ou comme le dit Albert Einstein : " Un problème créé ne peut  être résolu en réfléchissant  de la même manière qu'il a été créé ".

Lors de la  réunion du 25 février 2010 et de la visio de restitution du 12 mars2010, les échanges ont convergé vers cinq grands thèmes considérés comme importants par le groupe :

  1. Quelle place pour l'humain ?
  2. Les différentes fractures de la société
  3. Notre capacité de choix se développe-t-elle ?
  4. Les nouveaux modèles économiques
  5. Y a-t-il centralisation ou décentralisation des acteurs.
L'objectif de la deuxième réunion du 27 avril 2010 est de transformer ces thèmes en questions. Cependant, on observe que certains types de questions sont plus productifs que d'autres.

Ainsi, à la question " faut-il remettre l'humain au centre ", la réponse est unique (sauf peut-être pour certaines personnes qui ont vraiment l'esprit de contradiction). Une fois que l'on a répondu " oui l'humain doit être au centre ", on n'est pas beaucoup plus avancé. Nous parlerons de " questions de type 1 ".

De même, la question " y a-t-il centralisation ou décentralisation des acteurs " peut entraîner deux argumentations opposées, chacune disposant d'arguments judicieux. Les participants peuvent alors choisir l'une ou l'autre des positions mais sans arriver à se départager, chacun campant sur ses positions car considérant (souvent à juste titre) que ses arguments sont justes. Il existe cependant de nombreux cas où les deux positions sont suffisamment vraies pour ne pas pouvoir arriver à sélectionner laquelle serait vraie à l'exclusion de l'autre1. Nous parlerons de " questions de type 2 ".

La différence entre deux et " plus que deux "
PirahasIl existe un autre type d'approche qui est bien illustrée par des découvertes en anthropologie. La tribu des Pirahãs vit dans la forêt amazonienne. Ils n'ont que trois mots pour désigner les nombres : un, deux et... beaucoup. Contrairement aux apparence, ils n'ont pas simplement des capacités en moins due à un manque de vocabulaire. Ils ont une compréhension plus fine que nous de la différence entre :
  • Un : Une position, une idée unique, moi...
  • Deux : la relation ou l'opposition entre deux choses, la relation interpersonnelle entre deux personnes
  • Beaucoup : à partir de trois commence le groupe, la complexité, l'émergence de choses nouvelles...
  • Il existe des langues ou cette différence entre deux et les autres nombres supérieurs est inscrite. C'est le cas par exemple du grec ancien qui distingue en grammaire : le singulier, le duel (deux, " toi et moi ") et le pluriel (à partir de trois). C'est le cas également par exemple de la langue des Hurons ou encore de la plupart des langues slaves. En français, cette distinction existait mais tombe en désuétude : le mot " plusieurs " signifiait à l'origine " à partir de trois ". L'expression " une ou plusieurs choses " était donc une erreur et il fallait dire " une, deux ou plusieurs choses ". Cependant, les dictionnaires modernes de français sont aujourd'hui partagés. Même le dictionnaire de l'Académie française entérine cette ambiguïté.

Plusieurs : 1. Adj. indéf. pl. Placé avant le nom auquel il sert de déterminant. Qui est en nombre indéterminé et, le plus souvent, supérieur à deux ;
2. Pr. indéf. pl. Un nombre indéfini des personnes ou des objets appartenant à un ensemble plus vaste ; plus d'un.

Ce que révèle cependant le sens premier de plusieurs (à partir de trois), la distinction " duel "/ " pluriel " dans certains langues ou encore le terme " beaucoup " en langue Pirahãs est pourtant fondamental. A partir de trois commencent la complexité et l'émergence de nouvelles possibilités

Par exemple une crise est une remise en cause, différentes tendances s'opposent, mais cela peut être salutaire et faire avancer. Un conflit est une crise bipolarisée entre deux forces antagonistes. Si la crise est une période extrêmement utile de remise en question, il est difficile de sortir du conflit autrement que par la victoire du plus fort...

L'objectif du groupe de prospective numérique et de la table ronde qui sera organisée en octobre est " d'ouvrir les possibles " pour identifier des idées innovantes pouvant être converties en projets pour le territoire. Ce sont donc les " questions de type beaucoup " qui peuvent être les plus utiles pour identifier de nouveaux projets (des questions ouvertes). Elles peuvent s'appuyer sur des exemples de veille sur des solutions trouvées un peu partout à la question posée, afin de permettre aux acteurs d'imaginer leurs propres solutions adaptées à leurs besoins et au territoire.

Un exemple de passage d'une question de " type 2 " à une question de " type beaucoup "
A l'occasion de l'examen de la loi Davsi sur les droits d'auteurs (ancêtre de la loi Hadopi), la Fondation Internet Nouvelle Génération a cherché à rassembler les différents protagonistes : sociétés de droits d'auteur, acteurs du libre, etc.

Cependant, si la question restait " êtes vous pour ou contre le projet de loi " (question de type 2), les échanges seraient restés peu intéressants, chacun campant sur ses positions. La question qui fut posée au groupe fut alors " trouvons des exemples sur internet de modèles économiques innovants permettant à des artistes de vivre ". D'avril 2006 à mars 2007, le projet " Musique et numérique : créer de la valeur par l'innovation " a permis l'analyse de quelques 50 entreprises et de plus de 30 modèles économiques. Elle a permis de mieux comprendre six  sources innovantes de création de valeur économique et de trois sources de monétisation des contenus musicaux.

La synthèse : " Musique et numérique, la carte de l'innovation " a permis de stimuler l'innovation et l'invention de nouveaux modèles économiques adaptés.
 

Les discussions lors de la deuxième séance et de la visio de restitution ont abouti à une formulation plus ouverte pouvant servir de base à l'organisation de la table ronde :
  • Quelles interfaces ou machines pour interagir avec les humains tout en respectant leur place ? Trouvons des exemples d’interfaces et de machines qui soient : intuitives, non obligatoires, complémentaires, qui facilitent la confiance avec  la machine et l’indépendance de l’humain
  • Existe-t-il des exemples de réductions de fractures de la société qui étaient pourtant perçues comme impossible à résoudre ?
  • Quelles innovations  économiques ont rendu possible des projets qui autrement n’auraient pas été rentables ?

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Version imprimable | Thèmes discutés | Le Mercredi 27/10/2010 | 0 commentaires



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